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Co-construire le projet d’entreprise : la clé du succès

Par DROIT&PATRIMOINE

Paru dans Dirigeants n°7 - Avril 2019

Les dirigeants sont aujourd’hui nombreux à connaitre les ficelles du LBO et à savoir que le sacro saint alignement des intérêts passe avant tout par une vision partagée et un accord total dans le projet d’entreprise. Cette vison commune doit se construire ensemble pour sécuriser la relation fonds/managers. Mais que se passe t-il en cas de désaccord quelques années après ?

Comment traduire la logique de partenariat en matière de gouvernance ?

Pierre-Olivier Bernard : Tout dépend en réalité de l’équilibre des pouvoirs. Soit le fonds et le management s’inscrivent dans une logique de partenariat avec à la clé la recherche de l’alignement des intérêts, notamment en matière de gouvernance. Cet alignement doit cependant se construire en tenant compte du poids respectif de chacun : le manager est un actionnaire minoritaire et le fonds d’investissement l’actionnaire majoritaire. La gouvernance devra alors refléter cet équilibre tout en impliquant les dirigeants. Soit, mais c’est plus rare, le management a un poids beaucoup plus important et donc une capacité à imposer une gouvernance dans laquelle il aura par exemple la possibilité de jouer un rôle sur le processus de sortie et sur le respect du projet d’entreprise.

Aujourd’hui, dans les process d’open bid, les managers sont à la recherche du bon partenaire, ils ne se complaisent pas dans des promesses chimériques. Ils veulent également pouvoir s’assurer que ce que disent les fonds sera tenu, et cet engagement et ce contrôle doivent passer par la gouvernance. Les dirigeants souhaitent ainsi avoir des leviers si les promesses ne devaient pas être tenues, notamment en matière de sortie tout en préservant leur investissement initial. Lorsque le management a un poids important dans la gouvernance, c’est autour de ces leviers que les discussions risquent de se cristalliser.

Bruno Roqueplo : L’alignement des intérêts est un concept difficile à transcrire dans une gouvernance contractuelle organisée. Dans le LBO, le manager (et son équipe de direction) est responsable de l’établissement et de la réalisation du business plan (BP), le projet d’entreprise, qui est la base du contrat avec ses coinvestisseurs. Dans la mise en œuvre opérationnelle du BP, au-delà de la protection de son investissement, il aura l’obligation morale d’assurer l’équilibre entre les intérêts de ses actionnaires, ceux de ses employés et ceux, bien sûr, de son environnement sociétal.

Le manager veut donc essentiellement obtenir dans la gouvernance/ le partenariat qu’il établit avec ses coinvestisseurs, qu’ils soient majoritaires ou minoritaires, la certitude qu’il pourra exercer son mandat dans des conditions opérationnelles acceptables.

Au-delà de la structuration d’un package motivant et de règles de gouvernance explicitant ses obligations en matière de reporting et de prises de décision, il cherchera à s’associer à des coinvestisseurs qui comprennent son entreprise, qui sont conscients des enjeux du BP et qui seront capables de partager les moments difficiles comme les bons. Une alchimie à trouver au-delà d’une pure relation contractuelle.

Comment structurer le package afin d’appréhender des désaccords ou des ajustements pouvant survenir plus tard ?

Pierre-Olivier Bernard : Il peut effectivement arriver qu’il y ait une différence de vision entre le fonds et le management. Dans la plupart des cas, ce désaccord mène le fonds à se séparer du management. Mais le contexte peut différer. Depuis l’après crise, le projet d’entreprise est véritablement la clé de voûte du partenariat et est donc le critère premier dans le choix du fonds d’investissement. Les désaccords sur ce projet sont donc rares car les différentes questions ont suffisamment été débattues lors de la mise en place du management package.

Si un désaccord devait cependant apparaître, le management doit alors pouvoir sortir tout en préservant son investissement, ce qui est toujours délicat car il ne faut ni donner l’illusion d’une punition déguisée ni que ce soit un prétexte pour que le management démissionne et récupère de la liquidité dans des conditions de good leavers. Le débat va donc se concentrer sur rendre objectif le désaccord stratégique. Nous sortons ici des benchmarks habituels mais cela existe. Le désaccord peut porter sur la négociation du budget avec un premier budget présenté, des amendements demandés suivi d’un refus puis d’un deuxième refus… Il faut alors décrire cette procédure. L’enjeu sera de rendre objectif le désaccord stratégique pour permettre à chacun de retrouver sa liberté sans que chacune des parties se sente flouée. Parfois, un fonds d’investissement va utiliser une participation qu’il achète pour la mettre en concurrence avec une autre détenue en portefeuille ou pour acheter d’autres participations sans utiliser celle initiale. Il faut donc veiller à inclure des clauses de non-concurrence. Ce phénomène s’est accru avec l’arrivée des fonds infra qui jouent souvent un rôle de consolidation du marché d’infrastructure et qui, sur un secteur déterminé, vont acheter des participations concurrentes. Le danger réside dans l’information qu’ils vont avoir de ces différents concurrents. Ne vont-ils pas privilégier l’une des participations à défaut d’une autre ? Quelles sont les informations dont ils auront connaissance lors des conseils d’administrations ou des conseils de surveillances ? Le management et ses conseils doivent alors demander que leur participation soit la tête de pont pour pouvoir opérer la consolidation du marché en question. Il faut pouvoir maîtriser le projet d’entreprise et celui de consolidation. Il existe deux risques avec les fonds d’investissement sectoriels : ce projet de consolidation et le fait que ces fonds ont en interne des équipes capables d’appréhender le secteur d’activité concerné et donc d’être beaucoup plus intrusif en termes de management. Il faut donc s’assurer que les managers seront bien les pilotes du projet d’entreprise pendant la vie de la participation au sein du fonds. La mise en place de certaines clauses permettra de tester la réalité du discours autour du projet d’entreprise, notamment des clauses d’anti-dilution lorsque ce projet est fondé sur les opérations de croissance externe, et ainsi structurer l’équilibre en fonction des rapports de force des uns et des autres.

Il faut donc s’assurer que les managers seront bien les pilotes du projet d’entreprise pendant la vie de la participation au sein du fonds.


Bruno Roqueplo : Il n’y a pas d’autre approche que d’envisager et de contractualiser au mieux dans un package toutes les situations qui pourraient se présenter dans la vie de la participation. Cette contractualisation, même si elle s’est sophistiquée au fur et à mesure des années et des expériences des partenaires dans la vie des LBOs, est toujours limitée par l’obligation des parties de conserver leur indépendance, notamment quand il s’agit d’ingérence potentielle dans la conduite du BP et des opérations.

Par ailleurs, les désaccords se créant essentiellement par l’arrivée d’une divergence entre les résultats attendus du BP et la réalité, il est conseillé aux coinvestisseurs de mettre en place une structure de gouvernance qui inclut des administrateurs indépendants, capables d’apporter un éclairage sur la réelle performance opérationnelle de l’équipe de management par rapport aux facteurs exogènes ayant pu générer la divergence. Enfin, le management doit pouvoir accepter, ce qui est rarement envisagé et exprimé lors de la constitution du partenariat, que ses compétences en matière opérationnelle puissent et doivent être adaptées au fur et à mesure de l’évolution du BP. À l’heure du développement exponentiel des stratégies digitales notamment, de nombreux aléas et changements d’environnement concurrentiel peuvent effectivement impacter l’entreprise et son BP. Or, par nature, un package solidarise et solidifie une équipe de management. L’obligation de changer un des membres de l’équipe est souvent vécue comme une rupture inacceptable par le reste de l’équipe. Préparer cette obligation est un must.

Quelle vision ont les dirigeants du partenariat avec le fonds lors d’un LBO primaire ?

Pierre-Olivier Bernard : Certains nouveaux fonds s’intéressent à des opérations complexes sur le segment du small cap. Ils s’intéressent à des entreprises que le dirigeant/fondateur vend dans le cadre de transmission familiale. Ils deviennent donc acquéreurs et repreneurs d’entreprise mais également chasseurs de têtes, car c’est alors à eux de recruter une équipe managériale. Ils doivent donc piloter la reprise avec l’ensemble des difficultés liées à la transmission d’entreprises et recruter un dirigeant. L’équilibre et l’alignement des intérêts pour le nouveau dirigeant sont compliqués car, outre le fait d’avoir été choisi par le fonds, ce dernier a généralement déjà paramétré les choses sans nécessairement avoir donné une information très claire et très précise aux dirigeants. Nous avons alors un travail de pédagogie à fournir pour le respect des équilibres car n’oublions pas que sur ce type d’opération, les dirigeants investissent des sommes importantes et il faut veiller à protéger leurs intérêts. Par ailleurs, notre rôle d’intermédiation évite de polluer la relation d’un dirigeant qui a été recruté par le fond lui-même.

Bruno Roqueplo : Les dirigeants qui rejoignent un LBO primaire peuvent être issus de l’entreprise reprise comme être recrutés à l’extérieur. Dans les deux cas, ils sont confrontés à plusieurs types de difficultés. Peuvent être soulignés :

- L’établissement d’un BP crédible qui devra se démarquer de celui de leurs prédécesseurs, souvent fondateurs, enjeu encore plus complexe si cette habitude de valider un BP ne faisait pas partie des processus de l’entreprise.

- Se faire accepter par des équipes habituées à un style de management tout en ayant l’obligation d’entraîner et de motiver sur une transformation voire une rupture stratégique.

- Exercer leurs responsabilités opérationnelles dans une gouvernance nouvelle exigeant des relations actionnariales nouvelles ou différentes.

Ils sont donc essentiellement à la recherche d’un partenaire qui comprendra l’ensemble de ces problématiques.

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