
Assurance - Indemnisation des victimes d’accidents de la circulation : appréciation restrictive de l’abus de droit
Le passager d’un véhicule, dont le conducteur était en état d’ivresse, est blessé à la suite d’un accident de la circulation. Le tribunal correctionnel condamne le conducteur pour blessures involontaires, puis statue sur intérêts civils. La question posée était la suivante : la solution, posée par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) le 20 juillet 2017 (CJUE, 20 juill. 2017, n° C-287/16, Fidelidade-Companhia de Seguros), selon laquelle la nullité du contrat d’assurance pour fausse déclaration intentionnelle du preneur lors de la conclusion du contrat est inopposable à la victime, s’applique-t-elle dans le cas où la victime et le preneur d’assurance ne font qu’un ? En effet, en l’espèce, la victime était également le souscripteur de l’assurance et avait procédé à une fausse déclaration intentionnelle relative à l’identité du conducteur habituel du véhicule. La chambre criminelle saisit la deuxième chambre civile pour avis, laquelle transmet une question préjudicielle à la CJUE. Cette dernière confirme sa position favorable à l’indemnisation de la victime par un arrêt du 19 septembre 2024 (Cass. 2e civ., avis, 19 déc. 2024, no 22-70.015 D) : elle retient que la nullité du contrat d’assurance est inopposable au passager victime d’un accident de la circulation même dans le cas où celui-ci est aussi le souscripteur du contrat auteur de fausses déclarations. Dès lors que le cas n’est pas expressément visé dans la directive 2009/103/CE du 16 septembre 2009 concernant l’assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs, elle apporte une exception à ce principe en cas d’abus de droit.