
La gabegie financière de la plateforme « Gérer mes bien immobiliers »
Jeudi 23 janvier 2025, le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, a tenu une conférence de presse afin de présenter le rapport public thématique de la juridiction financière sur la plateforme de l’administration fiscale « Gérer mes biens immobiliers », qui a grevé le budget de l’État d’un montant de plus d’1,3 Md€ en 2023. Explications.
Si la juridiction financière avait délivré un satisfecit à l’administration fiscale pour la mise en place du prélèvement de l’impôt sur le revenu à la source, on ne peut pas en dire autant, loin de là, de la plateforme « Gérer mes biens immobiliers » (GMBI) opérée par le fisc et qui a été mise en place à la suite de la suppression progressive de la taxe d’habitation sur les résidences principales, devenue totalement effective au premier janvier 2023. « Un cas d’école de dysfonctionnement de la gestion publique, qui mérite d’être souligné », annonce d’emblée Pierre Moscovici, qui rappelle qu’au cours du mois de juin 2023, tous les contribuables propriétaires d’un bien immobilier ont connu les conséquences de cette application GMBI, mise en place pour moderniser la déclaration des biens immobiliers et la gestion des déclarations foncières et des taxes d’urbanisme. Les données recueillies devaient également fournir à l’administration fiscale des données sur les logements vacants et les résidences secondaires, qui auraient pu être exploitées, notamment dans le cadre de la révision des valeurs locatives cadastrales.
Un échec à plus d’1,3 Md€
La Cour des comptes, alertée de multiples problèmes relatifs à l’utilisation de la plateforme, a rendu un rapport thématique sur la campagne GMBI 2023, aux termes duquel elle identifie plusieurs conséquences graves de la mise en place chaotique du nouveau système, qui a occasionné une perte de plus 1,3 Md€ pour le budget de l’État. En effet, les multiples erreurs, notamment dues à l’absence d’informations ou à des informations erronées sur les déménagements et emménagements de locataires, ont conduit l’administration fiscale à appeler des taxes en réalité indues à hauteur de cette somme, qui ont été versées aux collectivités territoriales par l’État, collecteur pour leur compte de la taxe sur les logements vacants et de la taxe d’habitation pour les résidences secondaires. Les contribuables concernés ayant par la suite contesté la taxation, l’État a ensuite accordé des dégrèvements massifs, ce qui a appauvri d’autant le budget de l’État, responsable de la collecte, qui n’a pas récupéré les sommes versées aux collectivités territoriales. Nombre de contribuables ont été déroutés par la description, dans l’application, de leurs biens, différente de celle de l’acte notarié, et le rapport souligne que la mise en place d’une procédure 100 % dématérialisée était inadaptée à une population de contribuables où la proportion de personnes âgées était plus importante, ce qui a contribué à saturer les services, submergés de demandes. Le pilotage défaillant, le recours accru à des prestataires extérieurs et le triplement du coût initial prévu est également signalé. Le rapport appuie également sur le fait que les données recueillies via GMBI ne sont ni fiables, ni sécurisées, ce qui risque de repousser, encore une fois la révision des valeurs cadastrales, pourtant attendues de longue date. La Cour des comptes, qui n’a pas encore communiqué les chiffres pour la campagne 2024 a enjoint à l’administration fiscale de mettre immédiatement en ouvre des diminutions de dégrèvement.